Máté Paksy
Quelques
réflexions théoriques sur la jurisprudence récente rélative a l’article 4 de
code civil français
Introduction
Tout d’abord, il convient d’expliquer le titre de notre essai portant
sur l’article 4 du Code civil français – « Le juge qui refusera de
juger, sous prétexte du silence, de l’obscurité ou de l’insuffisance de la loi,
pourra être poursuivi comme coupable de déni de justice »
– et la jurisprudence récente qui lui est relative.
L’étude se présente sous le titre de « Quelques réflexions… »
afin de souligner qu’il ne s’agit ni d’une analyse détaillée de la totalité des
arrêts, ni d’une discussion de l’intégralité des études concernant l’article
4 et les problèmes pratiques, théoriques ou philosophiques qu’il
soulève, ni de l’examen de l’ensemble des controverses qu’il suscite
depuis son apparition il y a plus de deux siècles.
L’article 4 est indissociable du système du droit civil français ;
d’où l’intérêt que lui portent les théoriciens. Ainsi, l’analyse
de cet article permet non seulement de préciser le statut de cette norme par
rapport au système juridique mais contribue par ailleurs à
éclairer l’étrange mécanisme de l’interprétation juridique. Cependant, les
réflexions ne porteront que sur l’aspect théorique d’un certain nombre de
décisions juridiques relativement récentes.
Puis, l’adjectif « théorique » dessine les lignes de
démarcation qui sépare le théoricien de l’objet qu’il étudie. En acceptant les
présomptions méthodologiques et épistémologiques nécessaires, on pourrait dire
qu’il regarde le droit du point de vue « externe », réservant le
point de vue « interne » aux autorités qui sont autorisées à
interpréter et à appliquer les normes juridiques. Cependant les
spécificités du discours dogmatique impliquent que la doctrine se trouve entre
ces deux positions extrêmes. Les professeurs de droit civil, par exemple,
élaborent leurs interprétations comme s’ils étaient des praticiens. Ils formulent,
en effet, leurs interprétations comme des énoncés linguistiques plus
prescriptifs que descriptifs. Toutefois, leurs arguments n’étant pas reconnus
comme « source » du droit, les règles qu’établit la dogmatique
n’appartiennent pas au système juridique. Il est également possible de
supposer – comme le fait un des maîtres de l’école analytique italien[1] – que la soi-disant
« source » du droit, d’où découle le droit, n’est pas une
norme juridique, mais l’actes d’interprétation authentique.
De toute façon, l’épistémologie positiviste suppose au fond que le
théoricien reste un observateur du droit. Le terme « droit » ne
signifie pas à ses yeux le seul texte de l’article 4, mais comprend
plutôt les significations authentiques, celles établies par les autorités
compétentes. A cet égard, l’expression « jurisprudence récente »
qui figure dans notre titre semble inutilement longue. En vérité nous ne
tenterons pas de donner une analyse doctrinale ou structurale du texte de
l’article 4, mais tacherons de trouver les sens juridiques de la norme à
travers l’étude d’une partie de la jurisprudence récente qui s’y réfère.
Or, notre stratégie méthodologique ajoute une nouvelle distinction
importante à l’intérieur de la science du droit entre les recherches
scientifiques et la dogmatique juridique. Tandis que le juriste ne focalise que
sur une seule partie du système juridique, la tâche de théoricien est
plus étendue parce que double : elle consiste à décrire le droit
tel qu’il est, notamment, tel qu’il est formulé par les autorités compétentes
(et à travers elles par le droit lui-même) ; et à
vérifier (ou falsifier) le modèle élaboré en vue de cette description et
de sa vérification (ou falsification). L’article 4 permet de réaliser pareil
projet scientifique au moins partiellement.
Enfin, il nous reste à faire une précision méthodologique
importante concernant cette étude. Selon notre hypothèse ou
modèle théorique (qui est donc susceptible d’être vérifié ou
falsifié), une norme juridique n’est qu’une signification de l’énoncé
prescriptif du législateur, déterminée par l’ensemble des actes
d’interprétation authentique. Ceci signifiait auparavant la recherche de
l’intention ou de la volonté de l’auteur de la norme (en d’autres mots, du
législateur). Ici, nous la comprenons plutôt comme la recherche du mode de
détermination de la signification du texte d’une norme juridique par les
autorités compétentes (au moins prima facie)[2]. C’est pourquoi,
dans notre étude, les deux méthodes classiques de l’interprétation – la méthode
sémiotique (ou grammaticale) et la méthode systémique – servent comme une
typologie ou classification de la signification du texte de l’article 4.[3] Nous ne supposons
donc pas que les juges utilisent véritablement de telles méthodes
d’interprétation pour établir cette norme. Par ailleurs, ce qui est
intéressant, c’est le fait que la jurisprudence – ou bien les
significations – relative à cette norme ne soit pas très
nombreuse, en comparaison par exemple à celles concernant d’autres
articles aussi fameux du Code napoléon, ou encore de l’article 1 du Code civil
suisse.
Bien qu’elle ne soit pas quantitativement riche, on trouve dans cette
jurisprudence un désordre, une jungle, une véritable forêt de
significations. Fort heureusement, en regardant plus attentivement, on constate
que cette première impression n’est pas tout à fait juste. En
dépit des interprétations qui semblent nominalistes – les officiels semblent
donner une signification quelconque à certains termes du texte
prescriptif ou parfois à la prescription dans son ensemble – il existe
en fait une contraint très sévère qui régule ses actes (de
volontés). Il faut donc prendre en considération la contrainte que constituent
les interprétations libres des agents du système juridique les unes sur
les autres. Ceci signifie que les juges interprètent les termes de la
prescription individuellement ou dans leur ensemble, mais toujours par rapport
à d’autres actes d’interprétation produits par des autorités de
même niveau ou de niveau supérieur.[4]
En ce qui concerne les caractères généraux de la jurisprudence
et donc de l’objet de notre analyse, nous remarquons que la quasi-totalité des
arrêts analysés proviennent de la Cour de cassation[5] ; la cible de ces
arrêts est donc des décisions de juges d’Appel (ou de deuxième
degré). D’ailleurs, nous remarquons qu’en dépit du fait que quelques-uns des
arrêts étudiés sont énoncés par la Chambre criminelle de la Cour de
cassation[6], aucun ne condamne
un juge pour le délit de déni de justice en vertu des motivations indiquées
dans l’article 4. C’est le Conseil constitutionnel qui a donné une
interprétation très intéressante du terme ‘déni de justice’ sans
renvoyer à l’article 4, en le dépénalisant presque[7]. Enfin, nous devons
remarquer que la Cour européenne à Strasbourg n’a toujours pas interprété
l’article 4 du Code civil.
L’analyse de la
jurisprudence
I. – Les interprétations sémiotiques
Dans cette section, on voit très bien que les juges ne prennent
pas en considération la signification – bien sûr, assez complexe – de la
phrase, mais ils donnent plutôt des significations aux mots ou aux ensembles de
mots qui la constituent. Néanmoins, il n’y a aucune règle dogmatique ou
logique qui indique les critères qui déterminent leur choix. Pour
démontrer cela, nous allons regrouper les interprétations entre elles et
étudier successivement les parties linguistiques de la phrase.
A
– « Le juge qui refusera de juger …
Les arrêts relatifs à l’article 4 sont généralement des
contestations de décisions des Cours d’appels soumises à la Cour de
cassation, donc de prime abord, le terme « juge » semble renvoyer à
cette autorité.
Les arrêts en droit privé utilisent de manière générale le
terme « juge » ou « juges »[8]. Alors qu’en droit
pénal, ils sont plus précis et leur interprétation du terme est plus large: «
le juge » signifie non seulement le « juge pénal » mais aussi « les juges
répressifs » ou le « procureur de la République »[9]. Ces arrêts
cherchent à clarifier la signification de ce terme, mais celle-ci dépend
essentiellement de celle donné au « déni de justice ».
La nature polysémique du terme peut être
illustrée par un arrêt : dans une même décision –
exceptionnelle – du Tribunal de Grand Instance de Paris, trois significations
sont données au « refus de juger » :
« le refus de répondre aux requêtes ou le fait de négliger de
juger les affaires en état de l’être, mais aussi, plus largement tout
manquement de l’Etat à son devoir de protection juridictionnelle de
l’individu »[10].
Selon la jurisprudence « refuser » signifie en définitive « ne pas
statuer »[11], et non « refuser
d’examiner des problèmes scientifiques »[12].
B – … sous prétexte du silence, de l’Obscurite
ou de l’Insuffisance de la loi, pourra être poursuivi comme coupable de
déni de justice. »
La signification du terme « prétexte » paraît déjà obscure dans
le langage ordinaire. En l’absence d’arrêts tendant à éclaircir ce
terme, on retrouve des éléments de réponses dans la règle procédurale
corrélative à l’article 4. En effet, ‘le prétexte’ signifie la
justification ou la motivation ‘faible’ d’un jugement. Néanmoins, il est
important d’ajouter que la Cour a élargi cette signification pour y inclure la
qualification juridique de faits. Elle le fit par ce constat :
« viole l’article 4 … une cour d’appel qui, au prétexte qu’il est
réclamé une somme globale pour trois postes de préjudices dont un seul est
retenu … »[13].
Tout d’abord, contrairement à la doctrine,
la jurisprudence ne distingue pas entre les différents types de lacunes selon
le critère d’intensité. En fait, elle mentionne toujours les trois types
de lacunes ensemble. Par exemple, la Cour de cassation a déclaré
« qu’il n’aurait déni de justice qu’au cas de refus de juger, au
prétexte du silence, de l’obscurité ou de l’insuffisance de la loi […] »[14].
Ensuite, il faut ajouter que les juges ne semblent
pas respecter le caractère supposé exhaustif de l’énumération des
situations lacunaires. Donnons un exemple. La Cour de Cassation, à
l’occasion d’une déclaration judiciaire de paternité dans un contexte normatif
d’une législation évolutive, a déclaré :
« … alors qu’il n’aurait déni de justice qu’au cas de refus de juger,
au prétexte du silence, de l’obscurité ou de l’insuffisance de la loi, ou dans
l’hypothèse d’un renvoi systématique et persistant d’une affaire
à une date indéterminée mais non dans le cas, comme en
l’espèce, de renvoi dans l’attente d’un évènement déterminé et
proche »[15].
Enfin, la Cour étend la signification d’une lacune à la
qualification juridique des faits lorsqu’elle constate que la Cour d’appel a
commis un déni de justice en fondant sa décision sur « l’insuffisance des
preuves »[16].
La notion de « déni de justice » a été l’objet de plusieurs
interprétations authentiques.[17] Elle est connue non
seulement en matière privée, mais aussi en droit administratif, en droit
criminel, en droit international public et privé, voire même en droit
constitutionnel (comme une source du contrôle de constitutionnalité des normes
juridiques). Aussi, ce terme a perdu son ‘pedigree’ pénal presque totalement.
La signification première du terme « déni de justice » renvoie
à une situation juridique irrégulière. La Cour identifie
habituellement le «déni de justice» avec la situation normative produite par
des « décisions inconciliables »[18] ou quand deux
arrêts établissent des obligations contraires – « manifestement
incompatibles »[19] – dans un litige.
On trouve une interprétation similaire dans la jurisprudence du
Tribunal des conflits. Il estime aussi qu’une « situation lacunaire » est
produite par les conflits de décisions qui sont également jugées comme
constituant des « dénis de justice »[20].
D’ailleurs, le Tribunal met aussi l’accent sur la protection des droits
des parties au litige. Il l’a fait en qualifiant de situation juridique
lacunaire l’inexistence d’une règle applicable à un cas de
responsabilité sans faute. En l’occurrence, l’intention était d’éviter la
situation dans laquelle « le demandeur est dans l’impossibilité d’obtenir une
satisfaction à laquelle il a droit »[21].
Le Tribunal des conflits a donné la signification la plus parlante
de la notion de « déni de justice » dans une décision célèbre du Conseil
constitutionnel[22]. A première
vue, cette décision semble simplement qualifier de lacunaire la situation
produite par l’indétermination des compétences des agents du « jeu
constitutionnel ». En vérité et à plusieurs égards, le Conseil
constitutionnel est allé beaucoup plus loin dans son interprétation que les
autres cours, comme nous le montre une analyse plus attentive de cette
décision.
« Cette interprétation stricte des textes, même si elle se justifie
par une certaine politique jurisprudentielle, dans l’espace rapportée ici, elle
devait conduire à un véritable déni de justice »[23].
Par l’emploie des termes « interprétation stricte » et « politique
jurisprudentielle », il semble évident que l’interprétation de la constitution
possède une nature différente de celle des textes du droit privé ou
droit administratif.
Le Conseil constitutionnel répète son exigence de cohérence des
interprétations à plusieurs reprises –
« en acceptant de contrôler les actes préliminaires aux élections
législatives, le Conseil d’Etat s’est engagé dans une voie difficile : au
risque de déni de justice succède à présent un risque de
contrariété entre la jurisprudence administrative et la jurisprudence constitutionnelle
»[24], ou « la
jurisprudence restrictive du juge constitutionnel en matière électorale
»[25] ou « jurisprudence
assez contradictoire »[26],
– pour conclure enfin –
« ces deux décisions d’incompétence conduisent à un vide
juridictionnel particulièrement fâcheux »[27].
– c’est-à-dire qu’il rattache le
problème de déni de justice à celui de la lacune, sans évoquer,
évidemment et forte heureusement, la responsabilité pénale des juges qui en
vérité sont « coupables » dans la création de la
situation.
II. – Les interprétations
systémiques
Un système juridique est un ordre normatif
complexe. Ce n’est donc pas très surprenant de le comparer à un
véritable labyrinthe composé de règles procédurales et substantielles
renvoyant mutuellement les unes aux autres. Voilà la raison pour
laquelle l’interprétation « systémique » est la méthode la plus fréquemment –
ou la plus ‘systématiquement’ – utilisée par les autorités. On comprend
pourquoi il n’y a aucun arrêt dans lequel la Cour s’est contentée
d’interpréter l’article 4 sans se référer à d’autres normes juridiques.
En dépit de l’insistance de civilistes tels que
Renard ou Ripert sur la caractérisation ab ovo du Code Civil – et
plus particulièrement dans son le Livre 1er – de « droit
constitutionnel lato sensu » ou encore de « droit constitutionnel privé
», laissons pour l’instant le lien incontestable et étroit entre l’art. 4 et le
droit constitutionnel.
Ce qui rend la situation normative plus
intéressante, c’est le fait que les règles juridiques – essentiellement
celle du « déni de justice » en tant que délit, et l’institution du référé
législatif – auxquelles l’article 4 renvoie ont subi des modifications
essentielles ou n’existent tout simplement pas.
Afin d’exposer la manière par laquelle ce «
sous-système » est mis en jeu par les cours, il convient de simplifier
le texte de l’article 4 :
« Si une autorité refuse de décider et
justifie/motive sa décision par la constatation qu’il existe une lacune dans
les dispositions légales, elle doit être sanctionnée pour déni de justice
».
Il devient clair qu’il existe deux rapports aux
règles procédurales : l’une est une obligation catégorique de motiver la
décision (A) et l’autre est une sanction en cas de conduite contraire de
l’autorité (B).
a – l’article 4 et l’obligation de motiver la décision
L’obligation visée par l’article 455 du Code de procédure civile est la
suivante : « ...le jugement doit être motivé ». Selon la Cour de
cassation, il s’agit une obligation
catégorique et générale :
« L’obligation de motiver s’impose à toutes les juridictions
civiles et à tous les jugements »[28].
En vérité, le juge possède une liberté significative par rapport
à cette obligation. En ce qui concerne par exemple la « forme » dans la
jurisprudence, il est établi qu’« aucun texte ne détermine sous quelle
forme doit être faite la mention des prétentions et moyens des parties »[29].
Néanmoins, la jurisprudence est également
fidèle à l’image que la tâche du juge n’est rien d’autre que
déduire la solution du texte légal et constater les faits pertinents :
« … la décision qui énonce et discute les circonstances des faits et
les déductions de droit qui en découlent, sur lesquelles se fonde le jugement,
satisfait à l’obligation d’exposer les prétentions et moyens des parties
… » [30]
Il faut ajouter, que dans la jurisprudence certaines limites viennent
d’être cristallisées en ce qui concerne la justification libre du juge.
La disposition de l’article 5 du Code civil crée une des plus importantes
lignes de démarcation entre la culture juridique française et l’anglo-saxonne.
Une décision exprime exactement cette exigence et « vise l’art. 5 pour
censurer les juges qui ont ajouté à la loi une disposition qu’elle ne
comporte pas »[31].
b – l’Article 4 et le deni de justice
Selon la règle complementaire de é’article 4, l’aricle 180 du Code
pénal ancien, non seulement le juge, mais « tout administrateur ou autorité
administrative » sera puni pour déni du justice, et non seulement pour les «
prétextes » énumérés dans l’article 4, mais sous « quelque prétexte que soit ».
Les deux règles ne s’harmonisent pas parfaitement.
De plus, etant donné qu’aucun juge n’a jamais été
sanctionné pour « déni de justice » et encore moins condamné pénalement par une
cour criminelle, il vaudrait mieux considérer cette norme comme étant
non-appliquée. Par conséquent, l’article 4 – ne contenant aucune sanction –
peut être considéré comme incomplet.
Conclusion
Dans la conclusion, nous allons montrer d’abord
à l’aide d’un tableau que le liste des significations données par les
autorités n’est d’aucune manière exhaustive, au contraire, elle est
ouverte.
Les significations possibles :
Le texte de l’article 4 |
« Le juge, |
qui refusera de juger, |
sous prétexte du silence, de l’obscurité ou de l’insuffisance de la
loi, |
pourra être poursuivi comme coupable de déni de justice ». |
Les signi-fications, données par le juris-prudence |
Juge … Juge pénal … Juges répressifs … Procureur … etc. |
… le refus de répondre aux requêtes ou le fait de négliger de juger … … tout manquement de l’Etat à son devoir de protection
juridictionnelle de l’individu … etc. |
… ou dans l’hypothèse d’un renvoi systématique et persistant d’une affaire à une date indéterminée etc. |
… insuffisance des preuves … … décisions inconciliables (ou quand deux arrêts établissent des obligations contraires) … … décisions manifestement incompatibles … etc. |
On voit que l’interprète « authentique » peut attribuer des
significations variées à l’article 4. En principe, leur nombre est fini,
mais en vérité il se révèle infini. Ceci est vrai en dépit de
l’affirmation contraire de la pensée juridique traditionnelle qui énonce le
‘constat’ suivant :
« Vu l’article 4 du Code civil… la cour d’appel a méconnu le texte… » [32].
Mais comment une cour peut-elle méconnaître un texte ? Selon notre
hypothèse, ceci se révèle impossible puisque la liste de
significations n’est jamais exhaustive. Cette condamnation signifie plutôt que
la cour a mal choisi ou déterminé la signification du texte, que son choix
contredit la lecture cohérente du texte telle qu’établie par la Cour de
cassation.
Evidemment l’idéologie juridique ne permet pas de reconnaître pareil
fait dans un Etat de droit. C’est une des raisons pour lesquelles la Cour
interprète très souvent l’article 4 en y joignant
l’interprétation d’un autre article. Probablement, les autorités estiment que
plusieurs normes déterminent de manière plus précise la signification de
l’article 4 dans un cas donné. C’est pourquoi l’interprétation
nominaliste-grammatique est susceptible d’admettre également la méthode
systémique de l’interprétation.
Si par exemple l’article 4 constitue un commandement impératif
interdisant d’échapper illégalement à la procédure juridique, les
articles du Code procédural doivent être interprétés comme établissant
des obligations précises à la charge des autorités, indiquant leurs
compétences ou les conditions nécessaires pour rejeter les demandes des parties
au litige. En vérité, le principe de légalité mis en jeu ici est le suivant :
les normes dites « primaires » sont interprétées en respectant les normes dites
« secondaires ». Or, une décision est toujours motivée par plusieurs normes
« secondaires », vraisemblablement en raison de la méthode de
l’interprétation systémique que semblent utiliser les juges. Le désordre des
significations est mis en ordre par la contrainte interprétative et la
cohérence du raisonnement juridique établi par des autorités du même
niveau ou hiérarchiquement supérieurs. Dans un système juridique aussi
complexe que le droit français, les motivations des juges sont déterminées par
la « raison juridique ».[33] Ni la position de
la norme à interpréter, ni la « raison naturelle » des
juristes remplissent ce rôle.
Voilà pourquoi l’article 5 du Code
semble également remplacer la fonction de l’article 4, alors même que, du
point de vue théorique, ses normes ne possèdent rien de particulier par
rapport à l’article 4. Dans une telle configuration, l’article 4 n’est
pas plus qu’une interdiction de certaines motivations négatives de la décision.
D’ailleurs, c’est une thèse qui correspond
parfaitement avec le constat de Perelman. D’après lui
« l’article 4 en donnant au juge le pouvoir de combler les lacunes de
la loi, lui permet d’empiéter sur le pouvoir législatif, mais ce pouvoir comporte
une contrepartie : l’obligation de motiver les décisions »[34].
Puis, au niveau plus abstrait, c’est le droit constitutionnel et les
conventions internationales qui portent sur les droits et libertés des
individus qui ‘abrogent’ l’article 4. L’exigence célèbre de «
l’accès à la justice » ou bien du « droit au juge » paraissent
comme les nouvelles valeurs défendues par le droit. Cependant, il est à
souligner que ces textes sont interprétés par les autorités au niveau plus
haut. Par la pénétration du droit européenne l’interprétation de l’article 5
est la suivante :
« Si l’art 177 du Traité de Rome oblige les juridictions nationales
dont les décisions ne sont pas susceptibles d’un recours de droit interne
à soumettre à la Cour de justice des communautés européennes
toutes questions d’interprétation soulevées devant elles, l’autorité de
l’interprétation déjà donnée par celle-ci dans une espèce analogue
peut priver cette obligation de sa cause et la vider de son contenu »[35].
En effet, cette obligation et la sanction qui lui
est assortie sont véritablement imposées aux juges français par la
jurisprudence européenne. Est-il besoin de rappeler que la France a souvent été
condamnée pour le non-respect de l’article 6 de la Convention européenne de
sauvegarde des libertés et des droits de l’homme[36] ?
D’un autre côté, il faut traiter les raisons pour
lesquelles les juges ne préfèrent pas poursuivre les deux autres
méthodes classiques d’interprétation ou motiver leurs décisions sur elles.
En ce qui concerne d’abord la méthode génétique,
disons qu’elle suppose qu’il est possible de déterminer la « volonté » du
législateur et prendre en considération son « intention ». Toutefois,
même dans le cas d’une loi récente, cette méthode se heurte à des
difficultés considérables puisque personne ne sait qui est le véritable auteur
de la norme, et a fortiori quelles étaient ses intentions. Concernant
l’article 4, la tâche s’avère d’autant plus difficile que la norme est
ancienne.
Dans le cas qui nous intéresse, même en consultant l’ensemble des
ouvrages traitant du Code et des travaux préparatoires qui l’ont
précédé, ou encore d’autres études extrêmement détaillées portant sur ce
sujet[37], le résultat serait
certainement plus obscur qu’on le pense. Tout d’abord, il est difficile
d’imaginer ce que le législateur entend par « interprétation ». Il y a de
bonnes raisons de penser que les pères fondateurs (et Napoléon) ne
comprenaient ce terme comme plus dépassant le processus par lequel la signification propre du texte était
découverte. Comme un théoricien de nos jours le constate, « la nécessité de
l’interprétation échappait tout à fait aux théoriciens du XVIIIe
siècle »[38].
Selon la doxa donc de cette époque, si la
signification de la norme semble obscure, la dogmatique juridique propose des
méthodes pour aider à découvrir le vrai sens du texte juridique.
Vu qu’il s’agit d’une règle dont l’interprétation est
étroitement liée à la théorie de l’interprétation, nous devons
maintenant chercher les raisons pour lesquelles les juges contemporains ne
tentent pas de découvrir l’intention originelle du législateur. Il convient
d’expliquer ce fait du point de vue historique.
Nous savons par exemple que Portalis, un des rédacteurs du Code civil,
suggérait (en partant du postulat du législateur parfaitement rationnel) qu’il
n’y avait pas de lacunes en droit ou, s’il y en avait une, que le juge pouvait
toujours la combler en se référant à l’une des sources du droit
énumérées dans le Code. En effet, il a essayé d’introduire ce principe de
consultation avec la « raison naturelle » comme une « règle de clôture »
du Code. Il formule donc le principe célèbre de la manière
suivante :
« si l’on manque de la loi, il faut consulter
l’usage ou l’équité. L’équité est le retour à la loi naturelle, dans le
silence, l’opposition ou l’obscurité des lois positives » [39].
D’un autre côté, Portalis parle bien de
l’interprétation. Il en distingue deux types, l’un produit par voie de la
doctrine, et l’autre par voie de l’autorité.
Le premier type consiste à saisir « le vrai sens des lois,
à les appliquer avec discernement, et à les suppléer dans le cas
qu’elles n’ont pas réglés ». Le deuxième type « consiste à
résoudre les questions et les doutes par la voie de règlements ou
dispositions générales. Ce mode d’interprétation est le seul qui soit interdit
au juge »[40].
Les implications de cette épistémologie juridique
sont évidentes. D’une part la fonction d’interprétation « authentique » des
textes légaux est attribuée au législateur par l’intermédiaire du « référé
législatif », d’autre part l’énumération exhaustive des méthodes
d’interprétation est réservée aux « cerveaux juridiques », aux auteurs qui ont
et qui jouent un rôle éminent au sein de la « doctrine ».
Entre les deux, le rôle du juge est en quelque sorte nul puisque
l’intention du législateur est toujours claire. La raison en est que « dans la
tradition de l’école de l’exégèse, les notions de ‘clarté’ et
d’‘interprétation’ sont antithétiques »[41]. Autrement dit, le
juge n’interprète pas, il applique seulement la norme juridique.
La théorie corrélative à cette idée est
celle du « silence du législateur ». Elle suppose que le silence ou la lacune
en droit fonctionne comme une limitation à la compétence de l’Etat. La
théorie de la « règle résiduelle de la liberté » soutient l’idée que la
distinction entre « ce qui est permis » et « ce qui est interdit » pour les
citoyens comme pour le juge est toujours nette. Ceci revient à dire
qu’il n’existe pas de lacunes en droit, mais uniquement des conduites libres
à condition qu’elles ne soient pas interdites. Une thèse de cette
idéologie est énoncée par Portalis de la manière suivante : « ce
qui n’est pas contraire aux lois est licite »[42].
Mais les idées portalisiennes concernant la
réglementation des juges sont aujourd’hui contestées par le président de la
commission européenne. Comme un commentateur l’a très bien expliqué, une
majorité au sein de la commission voudrait déterminer l’activité du juge
à travers une norme impérative plutôt qu’un principe obscur : sous
l’influence de son président, elle a rejeté la position de Portalis.Voila un
cas d’interprétation qui se présente comme manifestement contraire à
l’intention du législateur. En réalité, son intention est introuvable.
D’un autre coté, le juge pourrait invoquer la méthode fonctionnelle ou
téléologique. A cet égard, la fonction de l’article 4 n’est rien d’autre que
d’obliger le « juge-syllogiste » à la reconnaissance de la
frontière entre le droit subjectif et le droit objectif, et l’amener par
là même au respect des droits naturels des individus. La raison pour laquelle on suppose que le juge suit
ce type d’interprétation – ceci est
également vrai en ce qui concerne l’êpoque des pères fondateurs du
Code qu’aujourd’hui encore – se trouve dans la croyance que les droits
individuels ne découlent pas de la volonté du législateur mais se trouvent dans
la nature. Dans cette perspective, certains pensent qu’un document
constitutionnel ou international – par exemple la Déclaration des droits de
l’homme et du citoyen (DDH) ou bien le Code lui-même, surtout
le principe d’égalité (art. 1), de liberté (art. 19) et celui du respect de la
propriété privé (art. 17) – ne font rien d’autre que transcrire les droits
naturels dans un texte de droit positif.
En outre, à côté de la tentative de
renforcer les pouvoirs du juge, de
l’amener par le moyen du droit pénal à décider en chaque cas et lui
faire croire de manière inconditionnelle en la rationalité parfaite du
législateur, il y avait une autre raison, bien établie également, pour
introduire cet article en droit français ; à côté du premier but
juridico-politique, ce but revient à limiter les occasions de mise en
jeu du mécanisme du référé législatif en cas de présence de normes douteuses,
et cela en application du principe suivant :
« … rien n’est plus naturel, en effet, que de faire
interpréter un acte par celui-là même qui en est l’auteur : ejus
est interpretari, cujus est condere »[43].
Or, il est connu que cette institution est abrogée
depuis longtemps. Cependant, malgré les tentatives effectuées à
plusieurs reprises – une des plus récentes ayant eu lieu à l’occasion
des réformes globales du Code pendant les années 1960 – l’article 4 n’a
pas encore été abrogé.
4° Enfin, retournons un moment à notre hypothèse de
départ qui veut que les juges déterminent le plus souvent la signification
des mots ou des ensembles de mots constitutifs de l’article 4 que la totalité
de la phrase linguistique en elle-même. Ceci se vérifie en général, mais
il existe bien des exceptions. Par exemple, l’article 4 énumère trois
formes d’existence d’une lacune. La doctrine, très souvent, les
catégorise selon l’intensité de la situation lacunaire. Elle se situe entre
deux pôles extrêmes :
« l’obscurité » --------------------® « le silence »
---------------® « l’insuffisance »[44].
Comme nous l’avons montré, la jurisprudence – contrairement à la doctrine – ne dissocie pas ces trois « types » de motivations interdites, et leur ajoute parfois une quatrième.
Comme nous l’avons montré, il n’y a aucune moyen empirique pour
vérifier que les juges mettent en jeu les méthodes classiques de
l’interprétation. On peut seulement démontrer que les autorités donnent des
significations quelconques au texte de l’article 4.
Or, du point de vue de la théorie, il n’y a rien qui empêche de
considérer cet article comme renfermant une norme juridique qui fonctionne
comme la règle de clôture du système du droit civil, constituant
ainsi sa « complétude »[45]. En cela, il
fonctionne comme un moyen qui vise à protéger les droits subjectifs,
niant le fait qu’ils se trouvent dans la nature, mais estimant au contraire
qu’ils existent en tant que significations de normes constitutionnelles
authentiquement établies par les autorités du plus haut niveau.
Nous pouvons reformuler cet argument dans un vocabulaire plus
contemporain en disant que l’article 4 établit le droit au juge ou l’accès
à la justice. C’est pourquoi l’article 4 et la notion de déni de justice
mettent en jeu la responsabilité de l’Etat en ce qui concerne son devoir de
rendre justice :
« Le déni de justice engage la responsabilité de
l’Etat et sa réparation suppose d’apprécier les conséquences de la faute au
regard des chances du demandeur de voir prospérer sa demande »[46].
En vérité, on ne trouve pas de
règles dans le système juridique français qui obligent le juge
à décider. Ce qui le force donc à protéger les droits des
individus, ce ne sont que les contraintes interprétatives qui existent entre
les différents niveaux de la hiérarchie du système juridique.
[1] R. Guastini, « L’ordre juridique. Une critique de quelques idées reçues », Analisi e diritto (2000), pp. 89-96.
[2] R. Guastini, ibid.
[3] Pour cette typologie cf. M. Troper, La philosophie du droit, Paris, PUF, 2003, 103 et s.
[4] Cf. pour la théorie de l’interprétation qui est la base de notre étude, M. Troper, « Une théorie réaliste de l’interprétation », dns O. Jouanjan (sous la dir.), Dossier. Théories réalistes du droit, Strasbourg, P.U.S., Annales de la Faculté de droit de Strasbourg, 2000, n° 4, pp. 51-68. Pour les critiques vives contre telle théorie cf. Ch. Leben, « Le principe d’égalité devant la loi et la théorie de l’interprétation judiciaire », dns G. Haarscher (sous la dir.), Chaim Perelman et la pensée contemporaine, Bruxelles, Bruylant, 1993, pp. 215-235.; R. Guastini, « Michel Troper e l’interpretazione della costituzione », dns P. Comanducci, R. Guastini (sous la dir.), L’analisi del ragionamento giuridico, Tome II, Torino, G. Giappichelli, 1989, pp. 249-265.; O. Pfersmann, « Contre le néo-réalisme juridique », Analisi e diritto (2001), pp. 231-285.
[5] Cour de cassation, Assemblée plénière, 1996-11-29, N° 93-20799; Cour de cassation, Chambre criminelle, 1966-06-29; 1982-07-06;1984-03-12, N° 83-91461; 1985-01-21, N° 84-93787; 1991-06-26; 2002-02-26, N° 01-83621; Cour de cassation, Chambre sociale, 1982-12-03, N° 82-60473; 1998-11-25, N° 96-42864; Cour de cassation, Chambre commerciale., 1991-10-08 N° 89-16.738; 1998-11-25, N° 96-42864; Cour de cassation, Chambre civile 1, 1972-06-27, N° 71-12862; Chambre civile 3, 1972-06-14, N° 71-11731; 1972-06-27, 7 N°1-12862; 1977-10-13; 1980-05-12; 1980-12-03, N° 79-11984; 1981-10-13; 1983-05-17; 1987-02-11, N° 85-17300; 1987-03-03, N° 85-14228; 1993-01-21, N° 92-60610; 1996-04-02, N° 94-14310; 1997-01-22, N° 94-13594; 1998-06-03, N° 96-12618; 2001-05-31; 2002-02-06, N° 00-10543.
[6] Tribunal des conflits, 1962-07-02; Tribunal de grand instance (Paris), 1994-07-06; 2000-06-14.
[7] Conseil constitutionnel, l’arrêt « Rebeuf », 1958-12-12, N°58-34.
[8] Par exemple Cour de Cassation, Chambre civile 2, 1993-01-21.Voir par exemple Cour de Cassation, Chambre civile 1, 1983-05-17.
[9] Par exemple Cour de cassation, Chambre criminelle, 1984-03-12 ; Cour de cassation, Chambre criminelle, 1991-06-26.; Cour de cassation, Chambre criminelle, 1982-07-06.
[10] Tribunal de Grand Instance (Paris), 1994-07-06.
[11] Cour de cassation, Chambre civil 2, 1993-01-21.
[12] Cour de cassation, Chambre civil 1, 1981-10-13.
[13] Cour de cassation, Chambre criminelle, 2002-20-26 N° 01-83621.
[14] Cour de cassation, Chambre civile 1, 1972-06-27, N° 71-12862.
[15] Cour de cassation, Chambre civile 1, 1972-06-27, N° 71-12862.
[16] Cour de cassation, Chambre civile 2, 1993-01-21.
[17] Voir du point de vue historique L. Favoreu, Du déni de justice en droit public français, Paris, LGDJ, 1964.
[18] Cour de cassation, Chambre civile 3, 2002-02-06, N° 00-10543 ou Cour de cassation, Chambre civile 2, 1997-01-22, N° 94-13594.
[19] Cour de cassation, Chambre civile 1996-11-29, N° 93-20799.
[20] En ce sens voir aussi l’articles 1, 2-4 de la Loi de 20 avril 1932.
[21] Tribunal des conflits, 1962-07-02.
[22] Conseil constitutionnel, l’arrêt « Rebeuf », 1958-12-12, N°58-34., III.15.
[23] ibid.
[24] ibid., III.20.
[25] ibid., III.17.
[26] ibid., III.18.
[27] ibid., III.16.
[28] Cour de cassation, chambre civile, 1977-10-13.
[29] Cour de cassation, chambre civile 2, 2001-05-31.
[30] Cour de cassation, chambre civile 2 , 1980-05-12.
[31] Cour de cassation, Chambre commerciale, 1991-10-08, N° 89-16.738.
[32] Cour de cassation, Chambre civile 3, N° 00-10 543 06-02-2002.
[33] J’emploi le terme « raison juridique » au même sens que M. Troper faisait dans son essais, intitulée « Autorité et raison en droit public français » in P. Vassart, G. Haarscher, L. Ingber, R. Vander Elst (sous la dir.), Arguments d’autorité et arguments de raison en droit, Bruxelles, éd. Nemesis, 1988, p. 123.
[34] Ch. Perelman, Droit, morale et philosophe, Paris, L.G.D.J., ²1976, p. 125.
[35] Cour de cassation, Chambre criminelle, 1966-06-29.
[36] Convention européenne de sauvegarder des droits de l’homme, l’article 6. § 1. : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue [...] par un tribunal [...] qui décidera [...] des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil [...] ».
[37] Par exemple A.-J. Arnaud, Les origines doctrinales du Code civil français, Paris, L.G.D.J., 1969 et Essai d’analyse structurale du Code civil français, Paris, L.G.D.J., 1973.
[38] M. Troper, « L’Etat de droit est-il un Etat limité ? », Revue hellénique des droits de l’homme (1999), p. 550.
[39] J.-E.-M. Portalis, Discours, rapports et travaux inédits sur le Code Civil Paris, Joubert, [1844], pp.12 et s.
[40] J.-E.-M. Portalis, ibid.
[41] Ch. Perelman, Logique juridique. Nouvelle rhétorique, Paris, Dalloz, 1976, p. 36.
[42] Portalis, ibid, p. 17.
[43] R. Carré de Malberg, La loi, expression de la volonté générale, Paris, Economica, 1984 [repr. Paris, Recueil Sirey, 1931,], p. 122.
[44] Cf. U. Klug, « Observations sur le problème des lacunes en droit », Ch. Perelman (sous la dir.), Le problème des lacunes en droit, Bruxelles, Bruylant,1968, pp. 85-103, spec. p. 89.
[45] Cf. F. Ost, M. van de Kerchove, Le système juridique entre ordre et désordre, Paris, PUF, 1988, 87 et s.
[46] Tribunal de Grand Instance (Paris), 2000-06-14.